Durée de la vidéo : 3:55 min
(Plan sur le major Alain Tanguay, un homme chauve et au visage oval, assis sur un fauteuil et vêtu de son uniforme bleu de l’Aviation royale canadienne)
Major Alain Tanguay : Mon nom, c’est le major Alain Tanguay. Lorsque j’ai été déployé en Haïti, j’étais commandant d’escadrille de recherche et sauvetage au sein de l’unité d’aviation qui était là-bas. À l’unité, il y avait plusieurs escadrilles, mais moi, je m’occupais seulement de la recherche et sauvetage lorsque j’étais là-bas.
(Apparition des mots « Les gangs de rue » à l’écran)
Major Alain Tanguay : On amenait toute l’aide humanitaire au monde, qui était pas nécessairement à Port-au-Prince, mais qui se trouvait dans les montagnes ou beaucoup plus loin des villes. Ça faque eux autres avaient besoin de plus d’aide. Puis ce qu’on faisait, on leur amenait de l’eau, de la nourriture et pis aussi un support moral. On se trouvait être sur le terrain. Il y avait des militaires au sol et pis nous on arrivait avec les hélicoptères et tout l’équipement pour les déposer. Pis eux autres, ils faisaient la distribution. Ce qui était choquant après ça, c’est de voir que toute cette aide-là qu’on apportait au monde était pillée par des gangs de rue, qui se trouvaient dans les montagnes. Pour aller chercher cet équipement-là qui avait été distribué, pis le ramener à la ville de Port-au-Prince, pour ensuite la vendre. Leur façon de vivre est un peu différente de qu’est-ce que nous on peut vivre ici au Canada. Ce qui fait que il n’y a pas vraiment de police ou de façon d’arrêter ces gangs de rue là. Pis ils ne cherchent même pas à se cacher non plus. Tu peux aller en ville pis tu les voyais se promener en moto, en voiture les fenêtres baissées avec leurs armes avec eux autres continuellement. C’était pas caché. C’était quelque chose qui était connu, mais quelque chose qui pouvait pas faire… d’après moi, il n’y avait pas les ressources pour pouvoir les arrêter.
Même que il y a une situation qui est arrivée, où on a appris qu’il y avait des orphelinats qui commençaient à manquer de bouffe. Et y’a deux orphelinats qui ont sorti de la liste comme quoi c’était des orphelinats où il y avait des Canadiens qui avaient travaillé là. Ça faque, on a décidé… ben le commandant de l’aviation, qui était là avec nous, a décidé de faire un acte humanitaire en leur apportant des vivres. On avait tout simplement utilisé un autobus qu’on avait rempli de toutes ces boîtes de ration-là pour le ramener aux orphelinats pour que les enfants soient nourris et tout ça. Pis à cause des gangs de rue, il a fallu prendre des précautions, disons assez hautes, pour pas que on se fasse vandaliser l’autobus pendant le transport jusqu’à ces bâtisses-là. Ils avaient barricadé toutes les fenêtres. On avait mis du monde armé à bord de l’autobus, pis y’avait une escorte en avant et en arrière de l’autobus pour justement s’assurer qu’on puisse se rendre sécuritairement aux orphelinats pour pouvoir faire la distribution des vivres. Faque, ça vous donne une idée de comment la majorité de la population vivait à Port-au-Prince. Ce qu’on a aussi remarqué beaucoup, c’était une culture de ville Port-au-Prince. Aussitôt qu’on sortait de la ville, dans les villages, dans les montagnes, même jusqu’à Jacmel où on est allés plusieurs fois, c’était complètement l’inverse. Oui, il y avait encore… les gangs étaient encore présents, mais beaucoup moins. Pis c’était plus… je vais dire… c’était plus humain.